Telegraph-road
Blues pour un chat noir.
Une envolée d'oiseaux dans le ventre.
De grands coups d'ailes froissant la peau décousue.
Les ressens-tu, toi aussi,
Posant leurs pattes sur les rameaux de ton coeur ?
Le Jazz effleurait les meubles avec vigueur. Duke Ellington embrassait d'un vol swingué ses pieds nus, enlaçait son corps paisible. Une lueur crevassée par la demi-ouverture des volets dégoulinait sur sa nouvelle toile de peinture ébauchée. La montagne irrésolue à l'âme d'aquarelle se réveiller avec indolence.
Et tu étais là, tu la regardais. Ses coups de pinceaux étaient doux et décidés, elle penchait légèrement la tête et tu aurais voulu embrasser la naissance de son cou. Elle souriait discrètement. Faisait-elle semblant de ne pas te voir ? Ta main enserra la porte. Ton coeur cinglé par l'admiration sondait les insidieux sentiments amoureux. L'impétuosité des battements. La moiteur et la chaleur des grands sentiments. Ta main enserrait plus encore la porte.
Elle empoigna son chiffon et changea de couleur.
Tu souriais.
"Et si je tombe amoureux" fût ta seule pensée.
Mais si tu étais déjà amoureux ?
Ce serait comme des ballons, et rouges et bleus et jaunes et verts, gonflés à l'hélium, froissant l'éther et ses nuages de coton pour évader un secret ineffable. Monstrueusement magique. Implacablement doux. Indéfectible.
<< Bob